lundi 25 avril 2011

Défense des intérêts économiques d’un pays : oui … mais à quel prix ?

Au cours de la visite en Inde du Président Sarkozy en décembre 2010, le Français Areva et l’Indien NPCIL (Nuclear Power Corporation of India Limited) ont signé deux accords cadre pour la construction de deux réacteurs EPR à Jaïtapur, dans l’Etat du Maharashtra (ouest de l’Inde). Au total, six réacteurs doivent être construits sur le site pour une production d’énergie de 9.900 mégawatts.

Le projet ne fait pas l’unanimité au sein de la population, notamment depuis la catastrophe nucléaire japonaise de mars 2011. Le 18 avril dernier, des manifestants sont descendus dans la rue. La situation a vite dégénéré, la police est intervenue et a tiré à balles réelles sur la foule. Bilan de l’affrontement : plusieurs dizaines de personnes arrêtées, des blessés de part et d’autre…et un manifestant tué. Quel gâchis... Si l’affaire n’a pas été étouffée (merci l’Agence France Presse), peu de médias l’ont relayée.  

Dans tous les cas nous retrouvons le scénario habituel lorsqu’il s’agit du nucléaire : craintes d’un côté, (ré)assurances de l’autre - mais surtout un dialogue de sourds. Le problème ici est qu’il y a eu mort d’homme. Alors je m'interroge : à partir de combien de vies humaines un projet doit-il être remis en question ? Quelle position adopter lorsque les intérêts en jeu sont si importants ? Les acteurs économiques ont-ils l’obligation morale de s'impliquer, ou bien doit-on laisser la sphère politique gérer cela en interne ?

lundi 18 avril 2011

Intensification des relations franco-indiennes en matière de défense

L’inde fait partie de ces pays que les industriels de la défense courtisent en vue de grappiller la plus grande part possible de cet immense marché. Dans cette compétition mondiale, la France essaie de s’imposer bon gré mal gré.

Il semblerait néanmoins que nos industriels marquent des points grâce au soutien ponctuel de l’Elysée.

Alors que la première visite du chef de l’Etat en 2007 s’était faite au pas de course, on constate que l’Elysée s’est mieux adapté à son client et partenaire en prévoyant une visite plus longue et plus attentionnée fin 2010. Quoi de plus normal alors que l’Inde se positionne comme un vecteur de croissance important pour l’industrie française ?

Développer des liens grâce à différents projets de coopération :

En Inde, la France fait habituellement valoir la solide expérience de sa Marine en favorisant un axe de coopération important : la lutte anti-piraterie et la surveillance maritime.

Si les Américains sont déjà sur le pont avec la vente de P-8I Poseidon, les Français font valoir leur expérience dans un pays dont l’exposition à la mer est très importante.

Dans le Golfe d’Aden, les deux nations coopèrent depuis 2008 et rien ne remplace une expérience positive entre deux forces armées.

L’Inde commencerait-elle à voir en la France un partenaire stratégique ?

Au-delà des discours, la France peine encore à s’imposer en Inde malgré les 10 milliards d’euros d’investissements récemment prévus par le ministère de l’Economie et des Finances (investissements principalement attendus dans les secteurs de la banque et des assurances).

Pour la défense, les contrats se multiplient mais s’évaporent souvent avant même leur mise en œuvre. En effet, de nombreuses forces vives s’affrontent en Inde : les Russes sont présents depuis de nombreuses années ; les Indiens se sont tournés vers les Américains pour acquérir des technologies de pointe ; certains savoir faire israéliens trouvent leur place sur le marché indien ; l’Europe, quant à elle, tente aussi une approche (non coordonnée).

Dans le domaine de l’aviation, les choses sont tout à fait caractéristiques de cette compétition exacerbée. La France tire son épingle du jeu en offrant une possibilité de coopération technologique et industrielle, ce qui intéresse particulièrement les Indiens. Lors de la dernière visite de Nicolas Sarkozy en Inde, la Présidente indienne Pratibha Patil déclarait : « Nous apprécions tout particulièrement l’acceptation de la France à nous fournir du matériel de défense de haute technologie dans un sens qui favorise aussi le développement de notre propre industrie de défense ».

Au-delà du MRCA (Multi-Role Combat Aircraft), ce gros contrat visant à doter l’Inde de 126 avions de combat de nouvelle génération budgétisé à hauteur de 10,5 milliards de dollars, l’Inde négocie depuis des années la modernisation d’une flotte de Mirage 2000 acquise au début des années 1980 en vue de remplacer ses MiG-21 russes vieillissants.

Un horrible cafouillage franco-français a longtemps opposé les industriels Thales et Dassault. La situation devenant intolérable, l’Elysée est intervenu pour enjoindre les deux patrons à faciliter l’avancement du dossier.

Thales aurait remporté le gros lot et devrait signer au printemps ce contrat tant attendu : 2,2 milliards de dollars pour doter 51 Mirage 2000 d’une meilleure capacité d’emport en carburant ainsi que d’autres équipements. Les Mirage 2000 indiens vont passer au standard -5 au cours des prochaines années.

Cette opération est réalisée en coopération avec l’indien Hindustan Aeronautics Ltd., qui prendra part à la modernisation de 47 des 51 Mirage concernés.