samedi 19 mars 2011

La France et l’Inde : pour un renforcement des relations commerciales

Le Président de la République française s’est rendu en Inde pour la seconde fois depuis le début de son quinquennat, en décembre 2010. C’est l’occasion de réfléchir au développement des relations entre notre pays et l’Inde, et de détourner momentanément notre regard de la Chine.

La fédération indienne rassemble 17% de l’humanité. Elle est devenue la onzième économie mondiale et son taux de croissance, de l’ordre de 8% l’an en moyenne, fait d’elle un marché attractif - la classe moyenne susceptible d’acquérir une vaste gamme de biens de consommation est évaluée à quelque 300 millions de personnes.

Cependant, la France a encore du chemin à faire pour se rapprocher du géant asiatique. « L’oubli de l’Inde », que déplorait déjà le philosophe Roger-Paul Droit en 1989, s’inscrit dans la relation à éclipses qu’entretient la France avec cet Etat-civilisation.

Le passé français subsiste aujourd’hui à Pondichéry, « fenêtre culturelle de l’Inde vers la France » selon Jawaharlal Nehru, ancien Premier Ministre indien. Quelques milliers d’habitants y sont de nationalité française, et les Pondichériens constituent une bonne partie des expatriés indiens installés en France (autour de 100.000 personnes, concentrées surtout à Paris).

Les grands médias français s’intéressent encore peu à l’Inde. A titre d’exemple, nos télévisions et journaux qui avaient dépêché une armada de correspondants pour couvrir les Jeux Olympiques de Pékin sont restés muets sur les Jeux du Commonwealth organisés à New-Delhi en octobre 2010 - cet événement, qui a lieu tous les quatre ans, a pourtant mis en compétition 7.000 athlètes venus de 70 pays.

Nos établissements d’enseignement supérieur commencent à attirer des étudiants indiens, normalement prompts à s’expatrier. Mais sur les 100.000 qui se trouvent à l’étranger, la France n’en accueille pour le moment que 1.900 (ils sont 15.000 au Royaume-Uni). L’augmentation du nombre d’étudiants indiens en France devrait néanmoins se poursuivre grâce au soutien de la France aux programmes de bourses et l’incitation franco-indienne à des partenariats entre établissements pour développer les accords inter-universitaires. Un projet d’université franco-indienne est également lancé, et de grandes Écoles françaises ont tissé des liens étroits avec l’Inde : l’INSEAD de Fontainebleau, l’Ecole des Mines de Paris, l’ESSEC qui a créé un MBA avec l’IIM d’Ahmedabad et Grenoble Ecole de Management, partenaire de l’Institut indien du Management de Bangalore.

L’intérêt français pour l’Inde est vif sur le terrain culturel : le salon du Livre de Paris a mis l’Inde à l’honneur en 2007 et les traductions d’auteurs indiens se multiplient, les films de Bollywood rencontrent un succès certain dans nos salles de cinéma, la manifestation Lille 3000 a célébré Bombay ; la France dispose par ailleurs de centres de recherche renommés sur l’Inde tels que le CERI, le CEIAS à l’EHESS, l’INALCO…

Nos relations politiques bilatérales se sont étoffées depuis 1998 avec le lancement d’un partenariat stratégique, la venue du Premier ministre indien à Paris en 2005, 2008 et 2009, la visite du Président Chirac à New-Delhi en 2006, puis du Président Sarkozy en 2008 et en 2010. Au niveau étatique, la relation est à la fois stratégique (nucléaire civil, coopération militaire), diplomatique (la France soutient la candidature de l’Inde à un siège de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU) et universitaire (des équipes de chercheurs travaillent sur des projets relatifs aux neurosciences, à l’exploration spatiale, etc.).

C’est surtout au niveau économique que nos relations doivent progresser : seules quelque 300 entreprises françaises sont implantées en Inde, un chiffre qui tend cependant à augmenter. Le manque de cadres français véritablement anglophones, la complexité du marché indien et sa culture très différente de la nôtre apparaissent encore comme des freins qu’il sera nécessaire de lever progressivement.

Ces points ne suffisent pourtant pas à justifier le manque de présence économique française en Inde. Pour l’expliquer, il faut aussi reconnaître la faible propension au « grand large » d’un capitalisme français converti à l’Europe, mais spontanément peu porté vers les horizons lointains - même si ces derniers sont porteurs de nombreuses opportunités.

Politique, culture, enseignement, commerce, tous ces pôles ont une grande importance dans les relations franco-indiennes. Ils convient néanmoins de veiller à ne pas laisser le « génie français » prendre le dessus, sans quoi le commerce risquerait de passer après tout le reste…

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